La principale préoccupation d’une personne consultant pour la première fois une orthophoniste est d’améliorer sa fluence verbale pour voir disparaître son bégaiement. Même si l’orthophoniste cherchera d’abord à corriger tous les troubles de la communication que le bégaiement a créés, elle dispose de techniques motrices qui amélioreront rapidement les qualités d’élocution du patient. Ce sont par exemple l’ERASM, le bégaiement volontaire, etc. Ces techniques permettent de nous rassurer en reprenant un certain contrôle sur notre bégaiement. Nous prenons alors conscience qu’il est possible d’agir sur notre bégaiement que nous pensions auparavant subir.

Malheureusement, ces techniques ne suffisent pas. Il est important pour l’orthophoniste d’intervenir à la source du problème pour dénouer un par un les nœuds qu’un bégaiement chronicisé a pu faire. Les techniques permettent de reprendre le contrôle sur notre bégaiement mais pas sur notre parole et nos facultés de communication. En cherchant à contrôler sa parole, une grande tension et un profond manque de spontanéité nuiraient à la personne bègue. Le bégaiement, en plus d’être un problème d’élocution, est avant tout un problème de communication, ce que l’analogie de l’iceberg permet d’expliquer simplement. La thérapie vise à permettre de recouvrer la parole, une communication efficace, même si le personne reste « à risque de bégayer ». Un travail en profondeur sur les perceptions, les croyances favorise un changement des attitudes qui permet de faire baisser le niveau d’angoisse même lorsque les bégayages surviennent. C’est ce qui, par ricochet rendra une parole normalement fluide (et non parfaite !).

En tant que personne bègue, nous investissons souvent une immense somme d’énergie à masquer notre bégaiement grâce à de savants subterfuges. Cet effort que l’on fait nous empêche de nous exprimer librement, et l’interlocuteur ne pourra réagir de manière adapté face à nos difficultés. Un premier travail important pour l’orthophoniste consiste à faire reconnaître le bégaiement à son patient. D’abord faire accepter le simple mot « bégayer » pour mieux l’expliquer, le comprendre, l’appréhender. Cesser de le voir comme quelque chose d’incompréhensible qui prive de liberté. Il s’agit de déculpabiliser, de ne plus se sentir honteux de bégayer. Ce nouveau comportement permet de se retirer un poids énorme sur les épaules, de pouvoir en parler naturellement et de faire en sorte que les autres perçoivent mieux notre handicap. Cependant, il ne s’agit pas là de faire accepter à la personne bègue son bégaiement parce qu’il n’y a rien d’autre à faire. Cette préparation est véritablement un premier pas pour soigner son bégaiement et réellement l’atténuer.

L’objectif principal est de retrouver une communication naturelle, donc efficace et spontanée. Le bégaiement nous a enfermé dans des réflexes de grandes appréhensions, voire de véritables phobies de communication. En identifiant et analysant les situations pendant lesquelles on réagit de manière disproportionnée, on peut perdre nos réflexes de peur et les remplacer par des attitudes normales de sérénité. Ce travail sur soi est long puisqu’il faut agir en profondeur, sur nos croyances et nos mécanismes d’auto-défense irrationnels.

Pour parvenir à ces objectifs, l’orthophoniste utilisera plusieurs moyens au cours du suivi. Le miroir puis la vidéo sont très souvent employés pour que la personne bègue ait une image réaliste d’elle-même et qu’elle puisse constater, travailler et noter ses améliorations. Un autre outil peut être la lecture à voix haute de textes induisant une forte charge émotionnelle : c’est ce que l’on appelle l’expression scénique, et ici dans le cadre d’un suivi orthophonique, la scénothérapie. Des jeux de rôle peuvent être mis en place pour affronter les situations que l’on redoute et les appréhender avec moins d’angoisse. Cela permet également de préparer la personne avant de réaliser les exercices sur le terrain, en situation réelle. Ensuite, des exercices orthophoniques assez classiques permettent de travailler la formulation d’idées et la capacité à se mettre à la place de l’autre, tels que le dessin dicté (la personne bègue réalise un dessin simple, l’orthophoniste doit reproduire ce dessin sans le voir, sur les explications du patient), l’élaboration de l’image (le patient décrit une image cachée à l’orthophoniste pour qu’elle en ait une représentation la meilleure possible), etc.

La dernière chose dont peut vous faire bénéficier une orthophoniste est la participation à un groupe thérapeutique. En complément de la prise en charge individuelle, l’orthophoniste regroupe quelques uns de ses patients pour améliorer la communication et se confronter aux autres dans un environnement sécurisant. Ces groupes sont l’endroit idéal pour mettre à profit tout ce qui a été vu individuellement avec l’orthophoniste.

Voilà à mon avis comment doit être le suivi orthophonique idéal. Je pense que ces explications peuvent vous guider dans votre choix de recourir ou non à l’orthophonie. A noter qu’il est préférable de consulter une orthophoniste qui a été formée au suivi de personnes bègues, sans quoi l’efficacité de la thérapie pourrait être moindre. Pour connaître ces orthophonistes, je vous recommande de contacter l’APB.